Cryptomonnaies
1 Généralités
Les cryptomonnaies, dites aussi cryptodevises ou devises numériques, sont des moyens numériques d’investissement et de paiement. Les plus répandues sont le bitcoin, l’ether, le litecoin et le ripple, mais il en existe beaucoup d’autres moins connues comme le Komodo, l’Ark ou le Zcoin. Plus de 4500 sont déjà en circulation et il s'en crée sans cesse de nouvelles.
Comme une cryptomonnaie peut se négocier sur différentes plateformes (exchanges), son cours peut varier d'une plateforme à l'autre.
On distingue trois types de jetons («tokens» en anglais):
les jetons natifs («native tokens» ou «coins»): ce sont des droits-valeurs numériques, qui ne confèrent aucun autre droit que celui d’en disposer. C'est de leur fiscalité que traite cet article.
les jetons adossés à des actifs («asset-backed-tokens»): droits pécuniaires de la partie qui les émet. Il s'agit de droits à une indemnité fixe ou à une certaine participation de l'investisseur, définie à l'avance, à une valeur de référence de l'entreprise qui les émet (p. ex. critère de résultat). Leur fiscalité dépend de la relation contractuelle entre l'investisseur et l'émetteur.
les jetons d'utilité («utility tokens»): garantissent à l'investisseur le droit d'utiliser des services numériques, le plus souvent proposés sur une plateforme (décentralisée). Leur fiscalité dépend aussi de la relation contractuelle entre l'investisseur et l'émetteur.
Cet article porte exclusivement sur la fiscalité des jetons natifs, c'est-à-dire ceux qui ne sont que de simples moyens de paiement numériques. Un document de travail de l'Administration fédérale des contributions (AFC) expose de manière générale la fiscalité des jetons adossés à des actifs et des jetons d'utilité. Leur fiscalité se détermine au cas par cas.
2 Jetons natifs constituant de la fortune privée
2.1 Impôt sur la fortune
Les jetons natifs sont assujettis à l'impôt sur la fortune (art. 46, al. 1 LI). Comme tout élément de la fortune privée, ils doivent être évalués à leur valeur vénale au 31 décembre (jour de référence), leur cours à la fin de l’année sur la plateforme utilisée faisant foi. L’AFC publie les valeurs fiscales officielles des dix jetons natifs les plus connus, comme le bitcoin, l’ether et le litecoin. Ces valeurs fiscales officielles représentent la moyenne des cours sur différentes plateformes.
Ils doivent être déclarés à la rubrique «Eléments de fortune/titres / Autres capitaux non déclarés ailleurs» en indiquant les éléments suivants:
Nom du jeton (désignation)
Devise = CHF - franc suisse
Rendement en CHF avant retenue de l'impôt anticipé (rendement brut)
Valeur fiscale au 31.12.2020 en CHF
2.2 Impôt sur le revenu
Les gains en capital réalisés sur des éléments de la fortune privée ne sont en principe pas imposables (art. 29, lit. k LI et art. 16, al. 3 LIFD). En droit fiscal, l'achat et la vente de jetons natifs sont assimilés à des transactions réalisées avec des moyens de paiement traditionnels (devises). Les plus-values de cession de jetons natifs ne sont donc pas assujetties à l'impôt sur le revenu et, inversement, les moins-values de cession ne sont pas déductibles des revenus, à moins qu’elles aient été réalisées dans l’exercice d’une activité indépendante (cf. chiffre 3.1 ci-après).
En revanche, les jetons natifs reçus en paiement d'une contrepartie sont des revenus imposables. La catégorie de revenu à laquelle ils appartiennent dépend de la nature de la contrepartie:
les loyers reçus en jetons natifs constituent du rendement de fortune;
les salaires reçus en jetons natifs constituent des revenus d'activité dépendante devant être déclarés dans le certificat de salaire (sous chiffre 1 ou 3);
les revenus passifs (gagnés par staking, lending, liquidity mining, etc.) constituent du rendement de fortune.
Ils sont imposés sur leur valeur au jour où ils ont été (fiscalement) encaissés (cf. article TaxInfo Réalisation du produit et des charges).
3 Jetons natifs constituant de la fortune commerciale
3.1 Activité lucrative indépendante
Tout jeton natif négocié dans l'exercice d’une activité lucrative indépendante constitue un élément de la fortune commerciale.
Le commerce régulier et intensif de jetons natifs est considéré comme une activité lucrative indépendante, sauf s'il consiste simplement à gérer sa propre fortune. Se référer à la circulaire de l'AFC n° 36 du 27 juillet 2012 intitulée «Commerce professionnel de titres» pour déterminer si le commerce de jetons natifs est professionnel ou s'il constitue de la gestion de fortune privée.
Le «minage» (création monétaire) constitue toujours une activité lucrative indépendante. Il consiste à créer des jetons natifs en mettant à disposition sa puissance de calcul.
3.2 Impôt sur le revenu
Les bénéfices réalisés dans l'exercice d'une activité indépendante sont imposables. Cela vaut pour les plus-values de cession et les revenus tirés du minage.
La fortune commerciale obéit au principe de la valeur comptable. Selon ce principe, les conséquences fiscales des fluctuations de cours se déterminent selon l'impact de ces fluctuations sur la valeur comptable, qui ressort des dispositions applicables du droit commercial (art. 960 ss CO) et du droit fiscal (notamment l'art. 21, al. 5 LI en relation avec l'art. 85 LI et l'art. 18, al. 3 LIFD en relation avec l'art. 58 LIFD).
Les jetons natifs qu'une personne exerçant une activité indépendante encaisse en paiement d'une contrepartie constituent du revenu d'activité indépendante. Ils sont imposés sur leur valeur au jour où ils ont été (fiscalement) encaissés
(cf. article TaxInfo Réalisation du produit et des charges).
3.3 Impôt sur la fortune
Les jetons natifs constituant de la fortune commerciale sont assujettis à l'impôt sur la fortune (art. 51, al. 1 LI) à leur valeur comptable établie selon les dispositions du droit fiscal et du droit commercial. Les jetons natifs ayant un cours boursier représentatif et dont la valeur a augmenté peuvent être enregistrés à l'actif du bilan à une valeur supérieure à leur prix d'acquisition (art. 960b CO ; mode d'évaluation optionnel).
4 Personnes morales
Les principes applicables aux jetons natifs constituant de la fortune commerciale (ch. 3.2 et 3.3 ci-avant) s'appliquent par analogie à ceux qui sont détenus par des personnes morales.
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